« Les Huguenots »
Les passages préférés de nos Chœurs
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Avec des parties pour chœur d’hommes de presque une heure et demie, et plus d’une heure et dix minutes de musique pour chœur de femmes, il n’est pas étonnant que le chef des Chœurs Emmanuel Trenque qualifie Les Huguenots de véritable opéra choral.
Dans cette œuvre de Meyerbeer, les chanteurs et chanteuses ne représentent pas une foule anonyme ou un chœur qui commente l’action, ils jouent de nombreux rôles : des étudiants catholiques, des soldats huguenots, des dames de la cour... L’occasion idéale de mettre nos choristes sous le feu des projecteurs. Nous leur avons demandé de sélectionner leurs passages préférés, et au chef des Chœurs d’expliquer ce qui rend cette musique si spéciale.
Acte 1 : Orgie, « Bonheur de la Table »
Air choisi par Bernard Villiers
Emmanuel Trenque : « Seuls les hommes et le personnage d’Urbain sont sur scène ici. C’est une musique extrêmement captivante, excitante même. Le texte est chanté de façon tellement rapide que c’est un véritable défi de faire sortir une telle cascade de mots. J’ai donc beaucoup travaillé la diction avec les Chœurs. Je trouve toujours cela extrêmement important, mais ici, cela mérite une attention particulière. D’autant plus avec un chœur aussi polyglotte, où tout le monde n’a pas le français pour langue maternelle. En même temps, ce passage recèle plusieurs niveaux. Parce qu’après cette partie dynamique et pointue, vous retrouvez soudainement le même texte mais cette fois-ci sous forme de valse. Tout devient très calme pendant un moment avant d’éclater à nouveau en fortissimo. »
Acte 3 : « Rataplan »
Air choisi par Luc de Meulenaere
ET : « Le troisième acte est délicat pour les Chœurs, car ils sont divisés en plusieurs sous-groupes. Il y a un chœur de marcheurs, il y a les étudiants catholiques, les soldats huguenots, et les femmes catholiques dévotes qui sortent de la chapelle. Il est particulièrement amusant à chanter. Les hommes du groupe de soldats chantent une onomatopée d’un tambour de guerre : « Rataplan ». Pendant quelques pages, ils sonnent presque comme un instrument, après quoi ils éclatent en un retentissant : « Vive la guerre ! ». Et ce qui rend ce morceau si spécial, c’est la façon dont chaque sous-section des Chœurs raconte sa propre partie de l’histoire. Parallèlement aux cris de guerre, on entend les prières des femmes et les acclamations des catholiques. Les membres des Chœurs jouent vraiment différents rôles ici. »
Acte 3 : Couvre-feu « Rentrez, habitants de Paris »
Air choisi par Lieve Jacobs
ET : « Il s’agit en fait d’une toute petite pièce, que les chœurs chantent depuis les coulisses à l’unisson. C’est l’un des rares moments de l’opéra où je peux réellement me tenir à leurs côtés pendant la représentation. Cela rend la chose plus amusante pour moi, bien sûr. Je ne dois pas suivre depuis le hall ou depuis ma loge, mais je peux participer activement à la production. Musicalement, le morceau ressemble un peu à du chant grégorien. L’Orchestre ne joue presque rien, il n’y a que quelques cloches qui sonnent. Il y a un soliste qui s’adresse aux chœurs, puis on n’entend que les choristes qui représentent à ce moment-là les Parisiens et les Parisiennes. Le public peut fermer les yeux quelques instants et rêver au son de leurs voix. »
Acte 4 : Bénédiction des poignards, « Gloire au Dieu Vengeur... Dieu le veut, Dieu l’ordonne »
Air choisi par Emmanuel Trenque
ET : « La scène ne dure que dix minutes, mais elle est très bien écrite. Meyerbeer a un grand sens de la dramaturgie quand il compose. Il valse entre les tonalités, les tempi passent d’un poco andante à un allegro furioso. Tout commence par trois moines qui chantent la mélodie, reprise par les Chœurs. Mais bientôt, les cuivres de l’Orchestre changent complètement l’ambiance. Encore une fois, c’est très rapide – un peu comme l’orgie du premier acte -– mais l’intention est ici complètement différente. Ici, c’est pour se préparer à la bataille. Tout se termine par une partie à l’unisson. Pour moi, cela renforce la tension sur les mots. Pensez au « Va pensiero » de Nabucco, où vous êtes aussi complètement aspiré.e par la musique. Il s’agit de vraiment utiliser le pouvoir de la masse. Et ici, si c’est possible, cette puissance encore magnifiée parce que vous avez d’abord ce passage contrapuntique complexe, qui culmine dans un chant très fort et s’éteint ensuite dans un « À minuit » presque chuchoté. »
Acte 5 : « Abjurez Huguenots »
Air choisi par René Laryea
ET : « C’est la toute fin de l’opéra. Les mots « Abjurez, Huguenots » sont répétés, toujours à l’unisson. Meyerbeer pousse la tension dramatique à son paroxysme. Il déroule ainsi le tapis rouge pour le climax des solistes quand meurt Valentine. Mais le tout dernier mot de cet opéra est pour les Chœurs, qui continuent à se battre, par le fer et par le feu, jusqu’à l’aube... »